Une biodiversité utile à la mangrove
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En Guyane française, la mangrove recèle encore de nombreux secrets. Des Brestois s’y intéressent.
Des racines de palétuvier qui s’entremêlent, immergées dans une eau salée au gré des marées. La mangrove est un écosystème surprenant, mais très fragile. Le CNRS et l’IRD(1) ont d’ailleurs décidé que l’année 2015 lui serait consacrée. Car la France en compte 105000 ha, dont 70 % en Guyane. « Cette mangrove se développe sur des sédiments déportés par les courants depuis l’embouchure du fleuve Amazone », explique Emma Michaud, chercheuse au Lemar(2) à Brest et responsable du projet Biomango(3), dont l’objectif est de mieux comprendre les relations entre la faune et la flore benthiques, les palétuviers et le fonctionnement de la mangrove.
« Les crabes, par exemple, sont indispensables à l’installation de la vie. Ils creusent des trous dans la vase et permettent que l’eau et donc l’oxygène circulent. » Cela stimule l’activité de certains microorganismes, qui décomposent la matière organique et produisent des nutriments utiles à la croissance des palétuviers, par exemple. Les scientifiques veulent ainsi comprendre le rôle de l’ensemble de cette biodiversité.
Depuis 2013, début du projet, les chercheurs ont mené deux campagnes de prélèvements. Un travail intense. « On peut s’enfoncer dans la vase jusqu’au cou, c’est difficile », décrit la biogéochimiste. Les échantillons récoltés sont analysés au retour à Brest. « Il faut identifier et décrire les nombreuses espèces inconnues. Nous étudions aussi les doses de phosphore, de carbone, d’oxygène... Nous voulons comprendre les échanges entre l’air, l’eau et la vase, et le rôle de la biodiversité dans ces échanges. »
La mangrove de Guyane, l’une des plus importantes au monde en termes de biomasse, est très particulière tant du point de vue de sa structure que de sa dynamique. « Elle peut subir une érosion due aux courants, qui la détruit en partie. Mais elle semble pousser plus vite qu’elle n’est érodée ! » Elle joue un rôle primordial pour le littoral guyanais : en stockant la vase, elle ralentit la houle et donc l’érosion naturelle. Elle abrite également une biodiversité utile aux oiseaux et aux poissons. Grâce à cet état des lieux minutieux, qui doit finir en décembre 2016, les scientifiques disposeront d’un état zéro de cette mangrove encore à l’abri des pressions anthropiques. Si, à l’avenir, des projets voulaient venir modifier cet écosystème, il serait possible de prédire, en partie, les conséquences sur sa biodiversité et son fonctionnement.
(1) Institut de recherche pour le développement.
(2) Laboratoire des sciences de l’environnement marin UMR CNRS/UBO/IRD/Ifremer.
(3) Biodiversité et fonctionnement des écosystèmes dans les mangroves de Guyane française. Projet ANR jeune chercheur qui rassemble des partenaires français et étrangers.
Emma Michaud
Emma.Michaud [at] univ-brest.fr (Emma[dot]Michaud[at]univ-brest[dot]fr)
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