Ça chauffe dans les villes !
Des géographes misent sur les espaces verts pour faire baisser les températures qui grimpent dans les centres urbains.
Cerisiers des villes ou cerisiers des champs. Quand vient l’époque de la floraison, lesquels rosiront en premier ? « Ceux des villes ! », affirment Vincent Dubreuil et Hervé Quénol, du laboratoire Costel, après des observations réalisées deux années de suite de février à juin. Ces géographes spécialistes du climat se sont entourés des biologistes du laboratoire voisin Écobio, pour étudier des rameaux de cerisiers (une centaine de bourgeons), placés à côté des vingt stations de mesures climatiques réparties judicieusement dans Rennes et ses alentours (lire encadré ci-dessous).
« La floraison est plus précoce d’une semaine en ville au moment du débourrement, c’est-à-dire à l’éclosion du bourgeon(1) », explique Hervé Quénol. Car l’énergie solaire de la journée reste accumulée dans le bâti qui est plus serré dans les zones urbaines qu’à la campagne. « Puis les choses se rééquilibrent quand arrivent les beaux jours, vers le mois de mai. La température de la ville reste plus chaude qu’à la campagne, mais l’impact sur la végétation est moins important. »
Plus que les cerises, c’est l’étude du climat à une échelle locale qui intéresse les chercheurs rennais. « Les villes grossissent et le climat se réchauffe. Et comme il fait plus chaud en ville, nous voulons mesurer la part de l’influence de la ville sur le changement climatique global », pose Vincent Dubreuil.
Cela nécessite de travailler à une échelle très fine, en utilisant des outils de modélisation qui n’existent pas encore. Avec des mailles de l’ordre du kilomètre carré, contre une cinquantaine dans les modèles globaux.
- La floraison des cerisiers est plus précoce d’une semaine en ville.
© Coyau
« Une ville est comme une mosaïque »
« Une ville est comme une mosaïque, explique-t-il. Il y fait globalement plus chaud, mais les espaces verts constituent des îlots de fraîcheur. L’idée serait d’augmenter la part de ces espaces verts pour contribuer à une diminution du réchauffement climatique. »
Pour affiner ces affirmations, les chercheurs rennais aimeraient poursuivre leurs travaux sur les rameaux de cerisiers et étudier des arbres entiers cette fois-ci, comme cela a déjà été fait sur des platanes.
« Nous avons de la chance car nos travaux vont dans le sens du plan énergie climat lancé par Rennes, poursuit Vincent Dubreuil. Nous sommes allés les présenter en septembre dernier. » Les chercheurs espèrent pouvoir les reprendre avant la prochaine floraison !
Mesure du climat en ville : une spécialité rennaise
Vingt stations de mesures climatiques fonctionnent en continu dans Rennes et sa banlieue depuis 2004, sous l’égide du programme Écorurb(2). « Des mesures similaires existent à Berlin, Barcelone, Boston..., dans de grandes métropoles, mais pas dans une ville moyenne comme Rennes !, précise Hervé Quénol. Écorurb est vraiment une originalité. D’autant plus que les variations climatiques y sont moins sensibles à cette échelle et donc moins faciles à mettre en évidence. » Prévues jusqu’en 2013, les mesures vont permettre d’alimenter les modèles de prédiction des géographes.
Écorurb est un programme pluridisciplinaire dans lequel sont aussi suivis l’extension des villes, par satellite, par d’autres géographes rennais du laboratoire Costel, et les impacts de cette extension sur la biodiversité en ville, par des chercheurs de l’Inra et du CNRS (lire p.16).
(1) Résultats de l’étude (master de recherche) d’Anne Mimet, laboratoires Costel et Écobio, en 2008.
(2) Écorurb : Écologie rurale urbaine. Lire dans Sciences Ouest n°221 - 2005.
Vincent Dubreuil, Tél. 02 99 14 18 55
vincent.dubreuil [at] uhb.fr (vincent[dot]dubreuil[at]uhb[dot]fr)
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