Une étude sur le point de se terminer veut réhabiliter les qualités nutritionnelles des matières grasses laitières.
Pourvoyeuse de cholestérol, alliée des maladies cardio-vasculaires... Depuis quelques années la matière grasse laitière a souvent mauvaise presse. Les nutritionnistes lui préfèrent sa collègue sudiste, l’huile d’olive. Et les industriels l’huile de palme, moins onéreuse. Alors, avant que le beurre ne soit banni de nos assiettes, la filière laitière a sollicité le Pôle agronomique Ouest, une association créée pour accompagner des projets de recherche en Bretagne et Pays de la Loire, afin qu’il mène l’enquête. Pour savoir si les graisses du lait n’étaient pas montrées du doigt à tort...
Miser sur la qualité
« Nous avons monté un projet de recherche sur les qualités nutritionnelles des matières grasses laitières, explique Stéphan Rouverand, chargé de mission au Pôle agronomique Ouest, qui peuvent changer en fonction de l’alimentation des vaches, de la saison... Beaucoup de publications les avaient un peu diabolisées, mais les études n’étaient pas toujours réalistes. Par exemple, elles se basaient sur un régime extrariche en beurre. Nous, nous avons décidé de nous concentrer sur une approche qualitative, et non quantitative. Car nous savons aujourd’hui que tous les acides gras ne se valent pas. » Le projet Innovalait a donc testé les effets de quatre régimes différents sur un modèle animal, le porcelet, puis sur l’homme lors d’une étude clinique, sur le point de se terminer. Avec en ligne de mire, l’athérosclérose, le mécanisme qui permet au cholestérol de se déposer dans les artères.
Des régimes sur mesure
Pour l’expérience, les scientifiques du projet ont sélectionné des lots de matières grasses laitières aux caractéristiques différentes : compositions en acides gras saturées, ou polyinsaturés, teneur en minéraux... « À partir de ces lots, nous avons composé quatre régimes comprenant exactement la même quantité de lipides. L’Inra de Saint-Gilles a mis au point les aliments pour les porcelets. » Pendant deux ans, des porcelets, sélectionnés dans une lignée de porcs ayant tous développé l’athérosclérose, ont été nourris avec ce régime sur mesure. L’étude clinique sur l’homme, elle, s’est déroulée sur huit semaines et ce sont les industriels partenaires qui ont fabriqué les beurres, fromages, crèmes et yaourts spécifiques, à partir des mêmes lots. « Nous allons étudier les marqueurs de la cholestérolémie, mais aussi des hormones et des marqueurs liés aux phénomènes inflammatoires, précurseurs de l’athérosclérose. »
Les choses sont complexes
Les premiers résultats devraient être connus le mois prochain. « Quels qu’ils soient, l’étude aura un effet bénéfique. La démarche a montré que les choses sont complexes, il ne s’agit pas uniquement d’augmenter ou de diminuer la quantité de matière grasse. Ou de tous se diriger vers le même choix, comme c’est fait aujourd’hui avec l’huile de palme, alors que l’acide palmitique, le seul qui la compose, n’est pas meilleur. » De quoi étaler une petite noisette de beurre sur sa tartine sans remords.
Marie-Pierre Cassagnes, Stephan Rouverand
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