Capter le bien-être des animaux

N° 284 - Publié le 13 juin 2014
© C. Le Petit - Anses
L’œil averti de l’animalier est nécessaire pour vérifier l’état du bec des poulettes avant leur transfert dans l’espace de ponte. Les capteurs ne font pas tout !

L’Agence nationale de sécurité sanitaire crée des outils d’évaluation du bien-être animal avec des physiciens.

Poussée par les crises sanitaires (vache folle, dioxines) et la pression des associations de protection des animaux, l’industrie s’intéresse depuis les années 1990 aux conditions d’élevage. Les capteurs, développés par des équipes de chercheurs multidisciplinaires, peuvent leur fournir des indicateurs du comportement et de la santé de leurs animaux. C’est ce qu’étudie l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), à Ploufragan. Christelle Fablet, ingénieure en épidémiologie à l’Anses, travaille sur les capteurs permettant de traquer les maladies respiratoires chez le porc. « Les conditions d’ambiance dans un élevage peuvent influer sur la survenue de maladies, dit-elle. En associant des capteurs de poussière, de gaz, d’hygrométrie et de température à des mesures de toux ou d’éternuements, on peut établir un diagnostic précoce et donner les premiers signaux d’alerte à l’éleveur pour corriger ce qui ne va pas. »

De la physique appliquée à la biologie

Son collègue Hakim Bergoug, ingénieur agronome, réalise une thèse de doctorat sur le bien-être des poulets. Il participe à un programme de recherche européen réunissant des informaticiens, des spécialistes des capteurs ainsi que des chercheurs en santé animale. « Nous essayons de bâtir des algorithmes permettant de faire le lien entre le signal émis par le capteur et la physiologie de l’animal », explique-t-il. Des caméras thermiques peuvent ainsi déceler un passage infectieux grâce à la détection d’une hyperthermie. Des capteurs atmosphériques peuvent aider à déterminer l’origine de lésions observées sur les poulets à l’abattoir. Autre exemple : des capteurs de pression au niveau des pattes d’un animal permettent de dépister des phénomènes de boiterie.

« C’est de la physique appliquée à la biologie. La multidisciplinarité est indispensable pour définir les bons outils de l’élevage de précision, qui s’inscrit dans la production animale durable », souligne François Madec, sous-directeur du centre de recherche vétérinaire de l’Anses. Les trois chercheurs insistent cependant sur la nécessité de maintenir la présence humaine dans les élevages.

« En Angleterre, une société de production de poulets a remplacé - pour des raisons de coût - les employés par des caméras de surveillance, raconte Hakim Bergoug. Il n’y a plus qu’une seule personne pour l’élevage de deux millions de poulets par an. » « Une option pas vraiment durable, ajoute François Madec. À force de décomposer le travail, on risque de créer des problèmes sociaux. » Et de jouer de façon négative sur le bien-être humain... 

Calibrage automatique chez les volailles juvéniles

La pesée individuelle sans intervention humaine se développe dans certains élevages de volailles. Elle permet de calibrer les animaux par rapport aux besoins du marché. « Elle fonctionne bien avec des animaux jeunes. Elle permet d’observer la courbe de croissance et d’anticiper sur la date d’abattage », observe Gérard Amand, ingénieur à l’Institut technique aviculture (Itavi). « À l’âge adulte, c’est plus compliqué : les rapports de domination entraînent des difficultés pratiques d’utilisation de la pesée. Certains animaux peuvent ainsi se maintenir sur la balance, et interdire aux autres d’y monter. »

Raphaël Baldos

Christelle Fablet
christelle.fablet [at] anses.fr (christelle[dot]fablet[at]anses[dot]fr)

Hakim Bergoug
hakim.bergoug [at] anses.fr (hakim[dot]bergoug[at]anses[dot]fr)

François Madec
francois.madec [at] anses.fr (francois[dot]madec[at]anses[dot]fr)

Gérard Amand
amand [at] itavi.asso.fr (amand[at]itavi[dot]asso[dot]fr)

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