L’obésité monte au cerveau

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N° 284 - Publié le 13 juin 2014
© Inra
Grâce à l’imagerie cérébrale, les chercheurs ont pu analyser l’activité du cerveau chez des miniporcs rendus obèses.

Des chercheurs rennais ont montré que l’obésité a des effets délétères sur l’activité cérébrale.

Cœur, artères, problèmes respiratoires... Les conséquences de l’obésité sur l’organisme sont nombreuses et connues. Sauf les plus inattendues. Des chercheurs de l’Inra(1) viennent de montrer que cette maladie provoque également des troubles dans le fonctionnement du cerveau. Grâce à une étude réalisée sur... des miniporcs, qui dépassent à peine 40kg normalement à l’âge adulte !

Gérer les émotions

« Des études réalisées sur l’homme depuis dix ans avaient déjà montré que des patients obèses présentaient une baisse d’activité dans certaines zones du cerveau, explique David Val-Laillet, chargé de recherche dans l’unité Système d’élevage, nutrition animale et humaine à l’Inra et coauteur de l’étude. Le cortex préfrontal essentiellement. C’est une zone impliquée dans la gestion des émotions, le plaisir et les comportements motivés. Elle joue également un rôle inhibiteur sur la prise alimentaire. »

Si l’activité baisse, il faut une stimulation plus grande pour arriver à une satisfaction alimentaire et le contrôle de l’alimentation s’étiole. C’est un cercle vicieux. « Nos recherches ont permis de prouver que l’obésité était à la source de ce dysfonctionnement, et non pas l’inverse. » Pendant l’étude, sept miniporcs ont été soumis à un régime grossissant. Tandis que leurs congénères du groupe témoin bénéficiaient d’un régime équilibré. Après cinq mois, une séance d’imagerie cérébrale a révélé que les cochons du premier groupe, alors devenus obèses, présentaient tous une baisse d’activité cérébrale. Les porcs “équilibrés” avaient eux conservé une activité normale.

Le facteur déclencheur

Constat supplémentaire, ceux qui ont pris le plus de poids sont également ceux chez qui les plus fortes baisses d’activité du cortex préfrontal ont été enregistrées. « Nous pouvons donc penser que c’est bien la prise de poids en elle-même, et pas l’alimentation trop grasse ou trop sucrée, le facteur déclencheur. Il faudrait maintenant étudier si les conséquences apparaissent dès le début de cette prise de poids, ou seulement lorsque l’obésité est installée. »

Ces résultats, publiés début janvier(2), ouvrent la voie à de nouvelles possibilités thérapeutiques. « Il peut être envisagé des traitements qui stimuleraient l’activité des récepteurs de dopamine, principales “victimes” de ce ralentissement. Car la dopamine joue un rôle majeur dans la sensation de plaisir, notamment alimentaire. Ou encore d’utiliser la stimulation magnétique transcranienne, déjà en place pour traiter certaines dépressions(3). » Du côté de la recherche, ce protocole a mis en évidence les miniporcs comme un modèle privilégié pour des études sur le cerveau. « C’est la première fois, en expérimentation cérébrale en contexte d’obésité, qu’on observe un effet similaire à celui observé chez l’homme. » Aujourd’hui l’équipe poursuit ses recherches, notamment pour savoir si la qualité des acides gras du régime alimentaire peut influer sur l’activité cérébrale.

Céline Duguey

(1 )Inra : Institut national de la recherche agronomique.
(2) Changes in Brain Activity After a Diet-Induced Obesity, David Val-Laillet, Sabrina Layec, Sylvie Guérin, Paul Meurice and Charles-Henri Malbert, www.nature.com/oby, 6 janvier 2011.
(3) Lire Sciences Ouest n°258 - octobre 2008.

David Val-Laillet
Tél. 02 23 48 50 72
david.val-laillet [at] rennes.inra.fr (david[dot]val-laillet[at]rennes[dot]inra[dot]fr)

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