"Je casse des gouttesde fluides"

Je réalise des expériences sur des gouttes de liquides et de fluides complexes, ni tout à fait liquides, ni tout à fait solides, comme le vernis à ongle ou le shampoing. Ces gouttes peuvent être minuscules, entre 10 et 100micromètres, ou plus grosses, de quelques millimètres. Elles se forment lorsqu’une pression, plus ou moins forte, est exercée sur le fluide. Je place sur leur trajet des casseurs de gouttes, des aiguilleurs, un vrai circuit ! Et je visualise leur parcours à l’œil nu, ou grâce à une caméra qui filme 10 à 100000 images par seconde. Aux deux échelles, milli et macro, il s’agit de produire des textures nouvelles, voire des matériaux. En cosmétique, par exemple, nous étudions la possibilité d’inclure un principe actif dans une goutte de fluide. Il faut alors étudier le temps nécessaire pour libérer le liquide prisonnier. En gastronomie aussi. La cuisine moléculaire se développe et pourrait être intéressée par de nouvelles saveurs. Nous cherchons donc à travailler avec des matières biocompatibles. L’alginate m’intéresse particulièrement. C’est un sucre issu des algues qui se gélifie lorsqu’on le sale.

Mais je suis aussi hydrodynamicien ! J’étudie la physique du mouillage. J’observe comment les liquides s’étalent sur des surfaces rugueuses que je construis en salle blanche. Ce sont des carrés de matière recouverts de plots microscopiques, bien alignés en réseau. À peine l’épaisseur d’un cheveu les sépare les uns des autres. Lorsque le bon liquide est associé au bon support, il s’étale en suivant la forme du réseau : carré, octogonal... Et lorsqu’il sèche, il tisse des réseaux entre les plots. La physique m’aide à comprendre ces structures, qui intéressent aussi des collègues, ceux qui travaillent sur les ondes lumineuses notamment !