Bien commun ou actif financier ?

L'eau, en péril ?

N° 419 - Publié le 30 avril 2024
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Le 7 décembre 2020, l’eau faisait son entrée à la Bourse de Chicago. « Elle est alors devenue un actif financier, comme le pétrole ou l’or », décrypte Marie-Hélène Hubert, enseignante-chercheuse en économie de l’environnement à l’Université de Rennes. Sans jamais détenir la moindre goutte entre leurs mains, des spéculateurs achètent et revendent cet actif en pariant sur la hausse de son prix pour maximiser leurs profits. Un prix déterminé par l’équilibre entre l’offre (qui dépend des précipitations) et la demande (qui varie selon les besoins : agriculture, industrie, lutte contre les incendies…). Cette « vision myope » ne prend nullement en compte les coûts de traitement, de transport ou encore d’assainissement, analyse Marie-Hélène Hubert. « L’eau ne serait pas entrée en bourse si la ressource ne se raréfiait pas », clarifie l’économiste. Mais la financiarisation d’un bien commun essentiel à la vie et auquel il n’y a pas de substitut pose des questions éthiques. En 2010, les Nations unies avaient d’ailleurs reconnu le droit à l’eau potable et à l’assainissement comme essentiel à la pleine jouissance de la vie et de l’exercice de tous les droits de l’Homme. « L’entrée en bourse va à l’encontre de cette logique puisqu’elle équivaut à une privatisation de la ressource à la faveur des plus offrants alors qu’elle est déjà mal répartie : 844 millions de personnes n’ont pas accès à l’eau potable dans le monde », souligne la chercheuse.

Violette Vauloup

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