Collecter pour mieux protéger
Les coulisses des collections scientifiques
Les captures et prélèvements d'animaux en milieu naturel, strictement encadrés par la loi, sont parfois nécessaires afin de comprendre et mieux protéger les espèces.
Au cours de l’Histoire, les sciences ont conduit à la mort d'innombrables animaux lors des prélèvements, allant parfois jusqu'à l'extinction de certaines espèces. Mais ces collectes létales sont aujourd'hui beaucoup plus limitées. En France, les animaux sont presque tous protégés par la loi de protection de la nature de 1976, elle-même alignée sur la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (Cites), signée par de nombreux pays à Washington, en 1973. En effet, la présentation de faune sauvage au public est encadrée par le droit français, qui définit autant la manière de concevoir des enclos ou aquariums que des règles sanitaires ou de sécurité. Dans chaque structure, le respect de ces règles est placé sous la responsabilité d'un professionnel reconnu par l'État. Et le tout est contrôlé par des organismes comme l'Office français de la biodiversité, la Dréal1 et les DDPP2.
Respect du bien-être animal
En milieu marin, les captures peuvent toutefois être autorisées afin d’agrandir des collections vivantes. « Pour les espèces du littoral atlantique, nos équipes ont le droit de pêcher ou de récupérer des animaux auprès de pêcheurs professionnels3 », explique Dominique Barthélémy, conservateur en charge du milieu vivant à Océanopolis. Quand des animaux protégés par la Cites tels que les coraux, les hippocampes ou certains requins viennent de l’étranger, l'aquarium brestois se doit de posséder des documents attestant de leur origine légale. Bien entendu, les captures posent des questions éthiques.
« Des citoyens peuvent considérer qu'on n'a pas à prélever dans le milieu naturel. Mais les captures ne peuvent être faites que dans le respect du bien-être animal, à des fins de recherche et de sensibilisation du public, rappelle le conservateur. Toutefois, la tendance est à prélever le moins possible et à élever les animaux pour qu'ils se reproduisent, ce qui permet de travailler sur leur conservation voire leur repeuplement. » Et le transport d'espèces protégées est réglementé au même titre que les collectes. « Même si on retrouve une chouette morte, il est interdit de transporter ne serait-ce qu'une seule de ses plumes ! », avertit Philippe Guillet, directeur du Muséum d'Histoire naturelle de Nantes.
Qu'en est-il des prélèvements occasionnant la mort ? « Ils ne concernent que les insectes, arachnides, poissons et crustacés », assure -t-il. Mais pourquoi les tuer ? « Contrairement aux mammifères et oiseaux, qui sont facilement identifiables dans la nature, il est souvent nécessaire d'étudier les insectes au microscope pour pouvoir les identifier », explique Philippe Guillet. Et en milieu marin, « ces études permettent de connaître les espèces et leurs interactions pour mieux les protéger », conclut Dominique Barthélémy.
1. Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement.
2. Directions départementales de la protection des populations.
3. Dans le respect de la réglementation en vigueur et des autorisations de collecte délivrées par la Direction interrégionale de la mer.
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du magazine Sciences Ouest