La vie souterraine des antibiotiques

Sols pollués - Des solutions existent

N° 391 - Publié le 26 août 2021
NICOLAS GUILLAS
Khalil Hanna étudie au laboratoire des échantillons de sols pollués.

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Un chercheur rennais retrouve des traces d'antibiotiques dans les sols. Il étudie aussi la dépollution de friches industrielles.

Khalil Hanna, physico-chimiste à l'ISCR1, étudie plusieurs types de sols pollués. Il participe à un projet pour caractériser la pré-sence de molécules issues de médicaments. « Les antibiotiques, utilisés pour l'homme ou en médecine vétérinaire, vont dans les sols et réagissent avec les composantes naturelles, dont les bactéries, explique-t-il. Celles-ci développent une antibiorésistance. C'est un problème de santé publique majeur. »

Des sous-produits inconnus

Pour ce projet associant le CNRS et un centre de recherche suédois, Khalil Hanna étudie au laboratoire des sols reconstitués ou naturels, extraits en France et en Suède. Avec son doctorant Tao Luo, il fait réagir des antibiotiques avec des substances minérales déjà présentes dans le sol : oxydes de fer, de manganèse ou d'aluminium. « Nous observons comment un antibiotique se transforme en sous-produits dans l'environnement. Ceux-ci étaient inconnus au bataillon, donc non repérables ! » L'étude dira quelles molécules exerçant une activité microbienne représentent un danger. C'est leur présence qu'il faudra évaluer dans les nappes, où l'eau potable est pompée.

Dans le cadre d'autres projets coordonnés par l'Ademe2, Khalil Hanna est en contact avec des industriels. L'objectif est la dépollution de sites dans l'est et le nord de la France. Certains sols sont contaminés par des HAP3, des polluants toxiques que l'on retrouve sous des raffineries ou des stations essence. D'autres contiennent du PCB4, un perturbateur endocrinien longtemps utilisé comme isolant dans les transformateurs. Le Rennais étudie aussi un site où étaient fabriquées des substances perfluoroal-kylées, notamment le PFOA5. Ce produit isolant est utilisé pour l'imperméabilisation des vêtements, les anti-adhésifs des poêles et les emballages alimentaires.
« Le PFOA est rémanent. Il s'accumule dans le sol, où il reste durant des dizaines d'années. »

Analyse des éléments actifs

Pour chaque site, le scientifique reçoit entre cinq et dix kilos de terre polluée, déstructurée ou sous forme de carottage. Le tamisage élimine les objets inertes, comme les grains de sable, afin d’analyser les éléments actifs, dont les oxydes métalliques et la matière organique. « Nous réalisons des tests au laboratoire sur ces échantillons. » Les expertises en physique et chimie sont complétées par des simulations numériques. Cette modélisation permet de retracer les déplacements des contaminants dans la nature, où l'eau joue un rôle central. Cette méthode de dépollution devrait être opérationnelle sur le terrain dans deux ans.

NICOLAS GUILLAS

1. Institut des sciences chimiques de Rennes.
2. Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.
3. Hydrocarbures aromatiques polycycliques.
4. Polychlorobiphényle.
5. Acide perfluorooctanoïque.

Khalil Hanna
02 23 23 80 27
khalil.hanna@univ-rennes1.fr

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