Il flaire la crise d’épilepsie

L'histoire continue

N° 374 - Publié le 26 juillet 2019
Alexis Chezière
À la Station biologique de Paimpont, Amélie Catala réalise sa thèse sous la direction de l'éthologue Marine Grandgeorge (à gauche)

Des chiens d’assistance détectent la crise d’épilepsie avant les symptômes.

Soudain, un chien empêche son maître épileptique de monter l’escalier. Il se couche près de lui pour l’apaiser ou s’empresse de lui apporter ses médicaments. « Des chiens préviennent parfois leur maître avant la survenue d’une crise d’épilepsie, explique Amélie Catala, doctorante au laboratoire Ethos1, sous la direction de l’éthologue Marine Grandgeorge2. De nombreuses anecdotes le racontent. Mais aucune étude expérimentale n’était réalisée sur ce sujet. »

Une odeur associée

La jeune biologiste vient de prouver qu’il existe une odeur associée aux crises d’épilepsie. Son étude a été publiée le 28 mars dernier3. Elle a été réalisée grâce à l’association Handi’chiens, avec la fondation Adrienne et Pierre Sommer4. La première étape a consisté à recueillir les odeurs de patients épileptiques, en collaboration avec le neurologue nancéen Jean-Luc Schaff5.

« Nous avons demandé à cinq patients de frotter un coton stérile sur leur paume, leur nuque et leur front, et de souffler dessus pour recueillir leur haleine. » Et ce durant quatre journées normales, deux journées sportives et lors d’une crise. Dans ce dernier cas, les patients étaient aidés par des soignants de l’hôpital.

Assister les humains

Les odeurs recueillies ont été envoyées outre-Atlantique. « Lors de l’étude, seulement trois chiens en France étaient formés à détecter l'épilepsie. Tandis qu’aux États-Unis, plusieurs chiens avaient déjà été remis à des patients. » La doctorante s’est tournée vers l’association Medical Mutts6, qui éduque des chiens de refuge à Indianapolis. Ils assistent les humains en cas d’anxiété, de stress post-traumatique, de diabète ou d’épilepsie.

« Ces chiens ont appris à “marquer” une odeur qui révèle un problème, précise Marine Grandgeorge. Ils adoptent un comportement particulier en sa présence. » Les chiens s’arrêtent pendant trois secondes devant le “parfum” visé. « Nous avons réalisé un test en leur présentant cinq fois les odeurs d’une même personne disposées aléatoirement dans une pièce, poursuit Amélie Catala. Le but était de savoir s’ils différencient bien l’odeur d’épilepsie des autres. » Les expérimentateurs ont poursuivi ce test avec plusieurs patients, pour observer si les chiens détectent cette odeur particulière, issue de personnes différentes.

100 % de réussite

« Cinq chiens ont été testés. Nous avons étudié leur sensibilité, c'est-à-dire à quel point ils marquent la bonne odeur, et sa spécificité », détaille Marine Grandgeorge. Résultat : trois des chiens ont 100 % de réussite.

Les deux autres ont 67 % de succès pour la sensibilité et 95 % pour la spécificité. « Ils n’avaient pas encore terminé leur entrainement contrairement aux trois autres », précise Amélie Catala. L’étude prouve qu’il existe bien une odeur d’épilepsie. Reste aux chercheuses à savoir si tous les chiens peuvent repérer cette signature olfactive… parfois sans avoir assisté à une crise d’épilepsie.

Claire Guérou

1. Éthologie animale et humaine (CNRS, Université de Rennes 1 - Université Caen Normandie), à la Station biologique de Paimpont.
2. Thèse co-dirigée par Hugo Cousillas, professeur de neuroéthologie à Ethos.
3. Dans la revue Scientific Reports.
4.Développement de pratiques fondées sur les interactions homme-animal.
5. Au Centre hospitalier régional universitaire de Nancy.
6. Cette association américaine collabore avec Handi’chiens.

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