Une mobilité à risques

N° 361 - Publié le 12 avril 2018
Julia Cochet
Grâce aux AlgoBox, en deux ans, la dune de Penvins (Sarzeau) a gagné plus de 2 mètres en largeur et 1,20 mètre en hauteur. Sa couverture végétale a été multipliée par quatre.

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Globalement en recul, le trait de côte est au cœur de recherches réunissant scientifiques, gestionnaires et citoyens.

En 50 ans, sur le littoral métropolitain, l’érosion a grignoté l’équivalent de 3100 terrains de rugby (26 km2). Si ce phénomène naturel est principalement dû aux tempêtes, il est aujourd’hui accentué par le changement climatique, la montée du niveau des mers, mais aussi par l’occupation humaine toujours plus dense de nos côtes. Pour préserver notre littoral, le ministère de la Transition écologique et solidaire a relancé en 2017 un programme d’actions, dans le cadre de la stratégie intégrée du trait de côte. En Bretagne, deux projets ont cet objectif en commun.

Un observatoire des risques côtiers
« Osirisc(1) est la suite du programme de recherche Cocorisco(2) qui a abouti en 2015 à la publication d’un guide méthodologique décrivant comment mesurer la vulnérabilité des côtes bretonnes face à l’érosion du trait de côte, la submersion marine et la migration dunaire », rappelle Alain Hénaff, géomorphologue à l’Université de Bretagne Occidentale et coordinateur des deux projets(3). Avec Osirisc, nous voulons concevoir un outil SIG(4) accessible sur Internet qui permettrait aux gestionnaires d’évaluer la vulnérabilité de leur territoire au fil du temps et de leurs décisions.

Pour déterminer cette vulnérabilité face aux risques d’érosion littorale et de submersion associés à une tempête, il ne suffit pas de mesurer les vents et le coefficient de marée, il faut combiner quatre facteurs : l’aléa (érosion, submersion, migration dunaire), les enjeux (nombre d’habitants, d’entreprises, d’emplois menacés, etc.), la gestion (moyens structurels et législatifs de réduction du risque en place) et enfin les représentations (connaissance et perception du risque des personnes exposées). « En indiquant sur un logiciel, par exemple, l’arrêt des constructions dans un site critique, la mise en place d’un plan de prévention des risques ou l’organisation de réunions d’information, les gestionnaires verront la courbe de vulnérabilité du site concerné s’infléchir. » Pour l’heure, cet observatoire numérique est en cours de développement avec la participation de gestionnaires de Dieppe, de Combrit-Île-Tudy et du Parc naturel régional du golfe du Morbihan.

Des balades utiles  
Dans le Morbihan, les plages de Kerjouanno et Penvins souffrent du recul de leur cordon dunaire. Pour protéger ces écosystèmes fragilisés, des chercheurs de l’Université Bretagne Sud y ont installé des AlgoBox. Ce sont des attrape-sable conçus avec des casiers de ganivelles, c’est-à-dire des clôtures constituées de lattes en bois. Remplies d’algues, ces structures captent le sable transporté par le vent, puis les pollens, et favorisent le développement de la végétation. « Pour valider leur efficacité dans le temps, nous voulions multiplier le nombre de relevés scientifiques, explique Mouncef Sedrati, géomorphologue du littoral à l’UBS. D’où notre idée d’impliquer des écovolontaires et de créer un Observatoire citoyen du littoral morbihannais (OCLM). » C’est au Réseau initiatives des éco-explorateurs de la mer (Riem) qu’est revenue la mission de gérer les observateurs sur place, de collecter et de vérifier leurs données avant de les transmettre aux scientifiques.

« En amont, nous leur proposons une formation sur le site de leur choix, pour apprendre à bien mesurer la hauteur de sable par rapport à des repères, la distance entre un pieu fixe et le bas de la falaise dunaire ou à identifier et évaluer la végétation de la dune. » Rejoindre l’OCLM est une opportunité pour les associations et les collectivités, en charge de plages vulnérables, de bénéficier d’un suivi fiable sans coût démesuré et de solutions respectueuses des dynamiques naturelles. « Contrairement aux digues ou aux enrochements, prévient Mouncef Sedrati, qui peuvent avoir des effets bénéfiques sur le site visé, mais délétères sur le voisin. » L’appel est lancé !

Julie Danet

(1) Le projet Osirisc implique des équipes du LETG UMR CNRS Brest Géomer, LETG-Caen Géophen, Laboratoire de psychologie : cognition, comportement, communication (LP3C), Laboratoire géosciences océan LGO UMR CNRS, Centre de droit et d’économie de la mer - UMR Amure.
(2) Connaissance, compréhension et gestion des risques côtiers - www.risques-cotiers.fr/fr/boite-a-outils/guide_cocorisco.
(3) Lire Tempêtes : quand la côte s’érode, Sciences Ouest n° 319-avril 2014.
(4) Système d’information géographique.

Alain Hénaff
tél. 02 98 49 86 11
alain.henaff@univ-brest.fr

Mouncef Sedrati
tél. 02 97 01 72 59
mouncef.sedrati@univ-ubs.fr

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