Soigner le diabète en courant
À Brest, des chercheuses en physiologie étudient les effets de l’activité physique sur le diabète de type II.
En 2014, la Fédération internationale du diabète estimait que 350 millions de personnes souffraient d’un diabète de type II (DII), un chiffre en constante augmentation qui pourrait atteindre les 600 millions d’ici à 2035. « Les diabétiques de type II ont quatre fois plus de risques d’être victimes d’infarctus, de crises cardiaques ou d’AVC(1) », signale Christelle Goanvec, maître de conférences en physiologie au sein du laboratoire Orphy(2) de l’Université de Bretagne Occidentale. Pour prévenir l’apparition de ce diabète et de telles complications, il est possible d’agir sur l’une de leurs causes communes : l’hygiène de vie. En pratiquant notamment une activité physique régulière. »
Un protocole qui colle à la réalité
Afin d’évaluer les effets de l’activité physique, Julie Dupas, doctorante de l’équipe, a mis au point un protocole de recherche le plus proche possible des conditions réelles d’apparition du DII chez l’homme. « Nous avons choisi des rats plus ou moins actifs et non prédisposés au diabète, représentant ainsi la population humaine dans sa diversité, explique-t-elle. Après avoir mesuré la vitesse maximale (Vmax) de course de chaque rat, nous les avons répartis, par tirage au sort, en quatre groupes. » Durant douze semaines, le groupe 1 (G1) a suivi un régime alimentaire avec ajout de fructose (sucre) dans son eau de boisson dans une proportion semblable à celle retrouvée dans les sodas ou les pâtisseries industrielles ; le groupe 2 (G2) a été soumis au même régime ainsi qu’à un programme d’exercice physique équivalent aux recommandations pour les humains : ils ont ainsi couru une heure par jour, cinq jours par semaine à 60-70 % de leur Vmax durant six semaines. Les groupes témoins 3 et 4, non diabétiques, ont suivi un régime normal (sans fructose) ; avec pour G4 le même programme d’exercice que G2.
Des bienfaits notables, dès six semaines
« Les rats des groupes 1 et 2 ont développé les symptômes du DII au bout de six semaines de régime », annonce Julie Dupas. Un premier résultat qui confirme l’hypothèse selon laquelle une grande consommation de fructose peut suffire à engendrer un DII.
Au terme des six semaines du protocole d’entraînement, sont apparus plusieurs effets positifs liés à l’activité physique, notamment une diminution du phénomène dit de résistance à l’insuline chez les rats diabétiques actifs (G2) par rapport aux rats diabétiques sédentaires (G1). « D’ordinaire, l’insuline régule le taux de sucre dans le sang. Elle se fixe sur des récepteurs pour favoriser l’entrée du sucre dans les cellules qui le transforment en énergie. Mais en cas de DII, ces récepteurs deviennent insensibles (résistants) à l’insuline. L’activité physique semble agir en “resensibilisant” ces derniers, expliquent les scientifiques. Elles ont également observé une amélioration du fonctionnement des vaisseaux (vasomotricité) chez les rats actifs (G2-G4). « Un excès de sucre dans le sang peut perturber la communication de l’endothélium, un tissu de la paroi interne des vaisseaux, vers le muscle lisse sous-jacent responsable de la régulation du débit sanguin par contraction/relâchement. Les vaisseaux ont alors tendance à rester contractés, ce qui induit un mauvais apport sanguin et des complications cardiaques. » L’activité physique pourrait donc, indépendamment du régime alimentaire, permettre un meilleur relâchement des vaisseaux et limiter ainsi le risque de maladies cardio-vasculaires associées au DII.
Une union attendue à Brest
Le 1er janvier 2017, sous réserve de validation par le Haut conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES), le laboratoire Optimisation des régulations physiologiques (Orphy, EA 4324) fusionnera avec le laboratoire Muscle STrié : adaptations en conditions physiologiques et pathologiques (MuST) issu du laboratoire Mouvement, sport, santé (EA 1274 M2S). « Nos équipes collaborent déjà fréquemment. Aussi cette fusion parait-elle naturelle, soulignent Christine Moisan et Marie-Agnès Metges, respectivement directrices des laboratoires Orphy et MuST. Nous pourrons ainsi élargir notre champ de compétences en physiologie cardiaque et musculaire, de la cellule isolée à l’animal entier, mutualiser nos outils depuis la biochimie à l’électrophysiologie et renforcer notre masse critique de chercheurs afin d’être plus visibles à l’échelle nationale et européenne. »
christine.moisan@univ-brest.fr
Marie-Agnès Metges
marie-agnes.metges@univ-brest.fr
(1) Accident vasculaire cérébral.
(2) Optimisation des régulations physiologiques.
Christelle Goanvec
tél. 02 98 01 79 79
christelle.goanvec@univ-brest.fr
Julie Dupas
tél. 02 98 01 63 50
Julie.Dupas@univ-brest.fr
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