Grossesses et solvants ne font pas bon ménage

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N° 270 - Publié le 9 août 2014
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Le risque de donner naissance à un enfant présentant une malformation est accru chez les femmes enceintes exposées régulièrement aux solvants.

Présents dans les peintures, les vernis, les produits d’entretien mais aussi dans les cosmétiques, les solvants sont absorbés par les voies respiratoires ou par la peau. Toxiques et capables de franchir la barrière placentaire, ils peuvent nuire au développement normal du fœtus et conduire à des malformations de l’enfant.

Des risques chiffrés

Les résultats de l’étude épidémiologique menée depuis sept ans par l’unité Inserm rennaise Gerhm(1) confirment aujourd’hui la nocivité de l’exposition des femmes enceintes aux solvants déjà suggérée par de précédentes études : le risque de malformations congénitales chez l’enfant lié à l’exposition professionnelle régulière de leur mère aux solvants est multiplié 2,5 par rapport à des femmes non exposées. Touchant d’ordinaire 2 à 3% des nouveaux-nés, les malformations observées touchent principalement les reins et les voies urinaires, l’appareil génital du garçon et le système labiopalatin (bec de lièvre).

Une méthodologie adaptée

« Pour parvenir à ces conclusions, notre équipe a débuté le suivi des femmes depuis le troisième mois jusqu’à la fin de la grossesse. Les enfants sont ensuite vus jusqu’à 6 ans minimum, explique Sylvaine Cordier, responsable de l’équipe Recherches épidémiologiques sur l’environnement et la reproduction de l’Université de Rennes 1. Avec cette méthodologie prospective, les réponses des femmes à nos questionnaires ne sont pas influencées par les éventuelles malformations de leur enfant. Contrairement aux études précédentes où elles étaient interrogées uniquement après la naissance de leur bébé. »

3 421 femmes suivies

Au début de l’étude, sur les 3421 femmes suivies, 30% d’entre elles affirmaient être régulièrement exposées à au moins un produit contenant des solvants sur leur lieu de travail. Des déclarations qui seront confirmées par des dosages des traces de solvants dans les échantillons d’urine.

Désormais, les chercheurs s’attachent à identifier précisément les types de solvants (éthers de glycol, solvants chlorés...) et à caractériser leurs liens avec des anomalies du développement intra-utérin. Outre le risque de malformation, cette étude étend son champ d’investigation aux possibles troubles tardifs de l’enfant (développement psychomoteur, allergies, pathologies respiratoires) pouvant être imputés aux solvants. D’autres polluants liés notamment à l’usage domestique des pesticides ou à la proximité de résidence avec des zones agricoles sont également analysés.

Si la nocivité des solvants est probable, en particulier ceux utilisés dans les métiers liés à la santé, l’entretien ou l’esthétique, reste à espérer que ces résultats soient pris en compte par nos institutions et que les femmes concernées se sentent le droit de demander un changement de poste dès le début de leur grossesse. 

Julie Danet

(1) Unité Inserm 625 : groupe d’étude de la reproduction chez l’homme et les mammifères.

Sylvaine Cordier, Tél. 02 23 23 59 29
sylvaine.cordier [at] rennes.inserm.fr (sylvaine[dot]cordier[at]rennes[dot]inserm[dot]fr)

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